Il parle avec la même poésie des défilés qu’il orchestre sous les feux des projecteurs. « Les créateurs sont chargés d’histoires, ils racontent une ambiance, montrent quelques tissus, évoquent des femmes. A moi de donner une réponse concrète à leur imagination. Trouver une écriture pour la lumière, la rendre narrative. » Il connaît toutes les marottes des stylistes pour lesquels il intervient régulièrement. Ann Demeulemeester, par exemple. « C’est une plongée lumineuse dans le noir. ON ne voit pas les installations, les rampes de spots. On ne sait pas d’où vient la lumière. Pourtant, à chaque passage, les vêtements irradient ; les modèles, très sombres, semblent eux-mêmes diffuser la luminosité. Je crois que c’est tout le propos d’Ann : la lumière intérieure. » Les couturiers lui demandent souvent l’impossible quatre semaines, voire quinze jours avant le défilé. Sauf Hedi Slimane, avec qui il travaille très en amont car le designer porte un soin particulier à l’éclairage. « Plus qu’une scénographie ornementale, la lumière est pour lui un véritable système architectural. Il y a des droites, des obliques, des faisceaux de lumière qui surgissent dans la pénombre. Des tensions, des enchevêtrements. Cela correspond, me semble-t-il, aux spécificités de son style : les découpes franches, comme au laser, de ses vêtements, une rigueur et une exigence dans son art. »
Il y a des pièges aussi, « certains tissus qui sont de véritables casse-tête à éclairer, comme les matières réfléchissantes et les mailles métalliques ». Et puis, il y a les mannequins, bien sûr. « Si je peux, je demande la même lumière dans les coulisses que sur le podium pour que le maquillage soit en adéquation avec le propos. C’est exactement la même histoire quand une femme se maquille dans sa salle de bains avec une certaine lumière, souvent un néon.